Sommet(s) pour le Climat_2

Tout a commencé en début d’année par une mise en contact avec Vincent Legrand, le directeur de l’institut des NégaWatt par mon bon ami Pascal Lenormand, ex Salomon, ex Mammut et qui a développé sa propre boite Incub. Les Négawatt, tiens, je connais… Je crois bien même avoir lu deux ouvrages de chez eux, offerts par mon frère, personnellement et professionnellement impliqué dans la transition énergétique via son bureau d’étude The Black Sheep Energy.

Ok ok c’est bien joli tous ces noms mais revenons-en à nos moutons justement… Vincent me présente donc l’ensemble du projet et m’explique les fondements de leur démarche. “Leur”, parce qu’il y a derrière ce projet toute une équipe :  Vincent Legrand, Pascal Ferren (ils formeront la cordée Vinscal lors de la traversée des Ecrins), François-Xavier Cierco, Lara et Serge Mang-Joubert, Emilie Gully, Julie Servien, Adrien Rodriguez, Félicien Poncelet, Bruno Cédat pour ne citer que les principaux. Vincent me rappelle des choses que je sais déjà et m’en apprend d’autres avec des mots simples, une voie claire et posée. Le sujet des bouleversements climatiques n’est pas nouveau pour moi. Mais tant que je prenais 30 avions par an (ça c’état avant…) et que je roulais un nombre de km bien supérieur à la moyenne nationale (ça aussi c’était avant…) je ne pouvais pas de l’autre côté m’investir légitimement dans des actions en faveur du climat. Bref, nous sommes en 2015, j’habite au pied des montagnes où je peux faire 90% des mes activités sans avoir à me déplacer. Ma pratique a changé, mes priorités aussi et le fait est que je me sens de plus en plus concernée par l’espèce de bombe climatique qui ne va pas tarder à exploser.

Du 30 Novembre au 11 Décembre 2015 se tiendra à Paris la COP21. Et c’est dans ce contexte favorable pour parler des bouleversements climatiques que le projet “Sommet(s) pour le climat” a vu le jour : d’une part les alpinistes sont les premiers témoins de ces changements climatiques et d’autre part les valeurs que l’on retrouve en montagne telles que l’engagement, la solidarité, la prise de décision, le courage, etc… sont justement les valeurs qui manquent en France pour se lancer dans une vraie dynamique de transition énergétique. Au lieu de cela, nous nous heurtons à de l’inaction, des carcans et des peurs. Face à cet immobilisme, “Sommet(s) pour le climat” a pour objectif d’interpeller nos décideurs et de mobiliser nos concitoyens sur la question des enjeux climatiques.

L’une des actions visible de “Sommets pour le Climat” est une traversée des Ecrins de 21 jours pour Vincent et Pascal accompagnés sur certaines sections par d’autres alpinistes tels que François Labande, Seb Ibanez, Cédric Dentant et moi-même.
J’ai donc eu le plaisir de partager la première semaine avec Vincent Legrand et Pascal Ferren, faisant cordée avec le grand guide Seb Ibanez puis le botaniste alpiniste Cedric Dentant. Une semaine magnifique sur les arêtes de la Meije puis celles de la Grande Ruine au tout début de la période caniculaire de cet été 2015. Une semaine avec de belles rencontres, une grande énergie, de l’engagement et surtout beaucoup de courage et de conviction. Car du courage et de la conviction il en faut pour se lancer dans 21 jours d’alpinisme en Oisans lorsque l’on est ingénieur et que l’on passe une grosse partie de son temps assis, que ce soit en réunions, derrière un ordinateur ou encore dans les transports en communs. Il y a là de quoi forcer l’admiration!

Petit retour en arrière…
Dimanche 28 juin : toute l’équipe de “Sommets pour le Climat”, et nous sommes nombreux, se retrouve à la Bérard, village rejoint en auto stop, bus et avec deux voitures remplies de matériel autant que de personnes. L’heure à l’organisation des sacs et pour Vincent et Pascal à l’organisation de leurs trois prochaines semaines. Ils ont prévu la plupart du matériel en double, en cas de casse durant ces 21 jours. Un espace de stockage nous est gentiment alloué au Chalet CAF de la Bérarde. Un bon repas et une nuit à la belle étoile viennent terminer ce dimanche de juin.
Lundi 29 Juin : le départ est lent, inertie de groupe oblige et puis tout le monde n’a pas encore trouvé ses repaires. Emily et Adrien, photographes passionnés se joignent à nous ainsi que Nicolas Hairon pour faire quelques images. Il fait beau, il fait chaud et la montée au refuge du Promontoire se fait tranquillement, au rythme des arrêts et des discussions. Nathalie et Frédi Meignant, accompagné par l’un de leur enfants nous doublent à la montée. Fredi n’est autre que le Président de la Mountain Wilderness. Ils sont contents et enthousiastes que le volet de la traversée des Ecrins voit enfin le jour.

Mardi 30 : ça attaque vite et fort avec Seb Ibanez qui donne le ton alors que le jour n’est pas encore levé. Il court comme un cabri sur ce rocher et je m’efforce de tenir le rythme. Nous sommes un peu lourds puisque nous avons pris du matériel pour bivouaquer et cela se sent. Mais finalement nous atteignons le Grand Pic de la Meije, attendons notre cordée Vinscal tout en faisant une bonne soupe. Ca ressemble un peu au repos du guerrier avant l’assaut suivant.

Du Grand Pic on traverse au Doigt de Dieu et de là nous avons deux options. Soit continuer par les arêtes jusqu’à la Meije Orientale, soit descendre en direction du refuge de l’Aigle pour remonter à la Meije Orientale. La cordée Vinscal prend l’option neige descente et remontée au Pic Oriental et la cordée Sebliv décide de continuer par les arêtes. Dès les premiers mètres j’ai presque commencé à regretter… C’est pas compliqué, il n’y avait pas un rocher qui tenait. Un pied de posé et c’est une cascade de pierres et de blocs qui s’écroulent… Bon au moins on aura un peu purgé pour les autres et puis rester sur le fil de l’arête avait un petit côté symbolique sympa malgré tout.

Mercredi 1er Juillet : il nous reste encore un gros morceau : Meije Orientale, Pavé puis Gaspard. On voit le Gaspard qui me parait loin, raide et un peu impressionnant. Mais l’heure n’est pas tant à se poser des questions qu’à avancer. Une première courte arrête de neige nous mène au rocher. De là commence une désescalade avant de réellement commencer la montée au Pavé. Le rocher sera d’ailleurs très bon avec quelques jolis passages d’escalade, surtout vers la fin, sous le sommet du Pavé. Premier sommet de la journée, rituel de la soupe histoire de s’hydrater puis c’est la redescente de l’autre côté pour aller chercher l’arête qui nous mènera au sommet du pic Gaspard. Encore une descente en rochers roulants branlants mais ce ne sera rien comparé à la descente du Pic Gaspard! Heureusement que je n’avais pas idée, sinon je n’y serai peut être pas allée.
La liaison Pavé-Gaspard n’est pas des plus évidentes mais Seb à l’expérience du terrain et mène nos deux cordées à l’attaque du Gaspard. Un Gaspard qui dans ce sens se laisse bien monter, avec un beau passage dans une cheminée raide suivit d’une traversée physique avec pas trop de pieds. Puis on se retrouve à l’horizontale sur le haut de l’arête jusqu’au sommet du Gaspard. Deuxième rituel de la soupe au sommet de la journée. Re lecture des topos pour la descente. Et c’est parti pour une descente un peu tendue avec des frigos suspendus en plus de tous les parpins. On ne s’en sortira pas trop mal avec seulement une tonche sur chaque corde. Un dernier rappel nous amène en dessous de la rimaye du glacier Claire et c’est presque une libération. La neige se descend facilement et un dernier petit rappel nous permet de prendre pied sur la moraine bientôt tapissée d’herbe. Hum, que le bivouac va être bon!

Jeudi 2 Juillet :
Nous poursuivons la descente pour rejoindre le vallon sauvage du plan de l’Alpe, véritable oasis de verdure et d’eau tumultueuse. Seb nous emmène à une source qui finit dans une belle gouille et nous pouvons nous tremper et nous désaler après 4 jours de marche à transpirer. Et ça, ça fait du bien…
Seb s’en va par le chemin du bas pour rejoindre Villar d’Arêne puis la Grave d’où il rentrera en Savoie en auto stop et train, tandis que Vincent, Pascal et moi prenons le chemin du haut et rejoignons le refuge d‘Adèle Planchard. La remontée est un peu longuette mais reste sympathique et nous sommes protégés du soleil par un beau cumulus ce qui rend cette approche moins pénible.
Là-haut nous sommes chaleureusement accueillis par Noémie et Aurélien, les deux gardiens. Le temps de tout faire sécher et de réorganiser les sacs et c’est déjà l’heure du repas, encore une fois délicieux! Entre temps nous avons appris que Cédric Dentant, botaniste au Parc National des Ecrins et que nous ne connaissons que par email nous rejoindra dans la nuit pour grimper avec nous l’arête Sud Est de la pointe Brevoort. En voilà une surprise! Car “Sommets pour le Climat” c’est aussi cela, des rencontres avec des personnes passionnées venues d’horizons différents qui manifestent leur intérêt et soutien au projet!

Vendredi 3 Juillet : L’arête Sud Est de la pointe Brevoort n’a rien de très difficile mais son accès est déjà limite en ce début juillet à cause de la canicule. Le couloir qui mène au col de la casse déserte d’où part l’arête est en terre et prend le soleil tôt le matin. C’est pas terrible. On fait de notre mieux pour éviter d’être dans le couloir qui parpine en prenant à droite, au maximum sur le rocher. Le couloir d’accès sera au final le crux de la journée. La suite alterne avec quelques très beaux passages d’escalade et des passages moins raides de petites montées et petites désescalade. Premier sommet de la journée et une fois n’est pas coutume, ce sera le seul. Le pic Maître ressemble vraiment trop a un éboulis de caillou et aucun de nous n’a plus envie d’y aller. Ce sera retour au refuge, repos, discussions et interviews avec Cédric, Noémie et Aurélien. Et puis il nous faut organiser la suite de la traversée, remettre le matériel de bivouac dans les sacs et se renseigner sur le glacier pour rentrer à la Bérarde.

Samedi 4 Juillet : retour à la Bérarde par le col de la casse déserte. Cette fois on le connais de la veille et nous sommes bien plus rapides donc moins longtemps exposés. En revanche le glacier de l’autre côté a vraiment un sale gueule et nous prenons un peu de temps pour étudier le cheminement qui nous semble le moins dangereux. Finalement ce sera une descente dans une partie un petit peu raide et glacée mais excepte de grosses crevasses ou de séracs bien penchés qui nous de permettra de continuer sans embûches jusqu’à la Bérarde.
Pour moi c’est la fin d’une belle Odyssée. Je dois rentrer à Chamonix. Je sais déjà que Vincent et Pascal vont me manquer même si je suivrai la suite de leur traversée et que nous nous enverrons des nouvelles par sms. Inévitablement la question de la suite se pose même si déjà d’autres actions sont prévues jusqu’à la COP21. Un premier dé a été lancé avec cette traversée, d’autres suivront.

La traversée s’achèvera ce dimanche 19 Juillet pour Vincent et Pascal. Mais vous pouvez toujours faire partie du projet qui se décompose en de nombreuses actions :
La signature par le plus grand nombre de la missive climatique aux décideurs. Si ce n’est pas déjà fait je vous encourage à prendre 5min en cliquant ici.
Le Summeeting, ascensions simultanée dans différents pays le week-end du 18 et 19 Juillet. Pour s’inscrire, contactez François-Xavier Cierco de Sommets pour le Climat : fx.cierco@gmail.com
La collecte de témoignages sur l’évolution du climat et la haute montagne. Le port du signe distinctif (demandez vos autocollants à contact@sommetspourleclimat.org).
La participation au concours photos qui donnera lieu à une exposition. La possibilité de dédier vos sommets au climat.
Un soutien financier pour réaliser le documentaire qui sera diffusé avant la COP21 et bien entendu le partage du message
J’espère qu’après ces explications, vous avez envie de nous rejoindre. Car la Transition Energétique, c’est une opportunité!!

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